Synthèse de l’atelier sur le sens de la QVT et le travail à distance par Olivier Leroy.
Marion Genaivre et Flora Bernard ont animé un atelier sur ce sujet d’actualité. Comme à leur habitude, elles ont cadré la réflexion avec quelques repères philosophiques puis animer le débat entre les participants pour questionner nos a priori, faire vivre le dialogue, explorer les arguments de chacun et donner du sens aux mots.
L’expression « Qualité de Vie au Travail » date des années 70 et vient du monde médical. Au fur et à mesure de la technicisation de la médecine, le risque apparaît d’oublier l’individu derrière le malade et sa maladie. Le patient est aussi (d’abord) un être humain et la façon dont il est « traité » a son importance. L’OMS entérine le terme en 1994. La QVT s’invite dans l’entreprise à partir de là.
Qualité de Vie au Travail renvoie, comme souvent, aux philosophes grecs de l’Antiquité qui s’interrogeaient sur le contenu d’une vie de qualité ou de « vie bonne » pour reprendre la formule d’Aristote. Il la définissait comme la quête du « souverain Bien », celui-ci associant le bon au juste.
Au-delà de l’attribut intrinsèque, la qualité est une propriété relationnelle : la qualité de ma vie dépend largement de mes relations : à moi, aux autres, au Monde.
Le travail a longtemps été une activité mésestimée. Chez les Grecs anciens, seuls les esclaves travaillent tandis que les citoyens pensent et se divertissent. Le travail renvoie à la subsistance, telle une nécessité biologique, qui ne crée pas de valeur pour soi. Jusqu’à un passé récent, il n’est pas considéré comme une activité humanisante.
Aujourd’hui, le travail est reconsidéré car travailler, c’est agir sur le réel (qui me résiste). Dans ce réel figurent les autres. La relation est donc au cœur du travail.
Au cœur du travail et au cœur de ma qualité de vie. Que fait alors la distance à cette relation ? Comment impacte-t-elle la manière dont on fait groupe ? Comment fait elle bouger les chaînes de solidarité ?
Le risque existe que le « chacun chez soi » se transforme en « chacun pour soi ». En effet l’éloignement rend l’autre plus abstrait. Le risque de la réification est d’utiliser l’autre, mon collègue, mon collaborateur, uniquement comme un moyen. La distance pose problème si elle renforce l’indifférence à l’être humain derrière le collaborateur.
Comment (re)créer de la proximité sans la présence ? Et maintenir la réciprocité d’attention ? Comment consolider l’unité de temps (et d’action) quand l’unité de lieu se défait ? Sûrement pas en coupant les caméras ! Qu’a-t-on à se dire et comment on se le dit en « visio » ?!
Le débat a fait ressortir que la QVT est fortement dégradée par la distance. Même si le « home office » peut amener du confort, le plaisir de faire équipe diminue et le sens se dilue à mesure que le « faire ensemble » disparaît.